LE PATOIS DANS LE CANTON DE SAINT-PIERRE DE CHIGNAC

pour Charles Mespoulède et Henri Lamy

d’après une étude publiée en 1927
par Gaston Guillaumie
agrégé de Grammaire et natif d’Atur

 

1. Avant-propos

2. Introduction
    Les limites du dialecte
    Les zones phonétiques
    Le canton de St Pierre
    de Chignac

3. Prononciation

  4. Glossaire :
I. La nature
II. La terre et ses aspects
III. L'eau
IV. Routes
V. Le règne végétal
VI. Le règne animal
VII. La maison
VIII. L'ordre et le ménage
IX. En dehors
X. Les travaux rustiques
XI. L'activité
XII. La propriété

 

5. Lexique

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GLOSSAIRE


Les mots composant le glossaire ont été exclusivement recueillis sur place, dans le canton de Saint-Pierre de Chignac, […].

 

    I. LA NATURE, PHÉNOMÈNES ATMOSPHÉRIQUES

     

    1) Ciel, orientation

Le ciel se dit, dans tout le canton lou siau et lou seù. Pour désigner la direction du nord, on dit : en amoun ou en sus, et celle du sud en ba. A l’est se dit : au lévan ou a l’óuto. L’ouest c’est lou coueijan ou lou plouiau (ce mot désignant aussi le vent qui amène la pluie). Lou traver est le N.-O. L’horizon s’appelle orlu ; au zénith se dit en lu. Pour exprimer l’image de la calotte du ciel, on se sert des expressions : Jou la chapo dóu siau, jou la rodo, la parruco dóu soulei.

 

2) Lune, étoiles

On dit bien la luno, mais plus souvent : la luio, et au trelu de la luio, c’est le clair de lune. La nouvelle lune est dite : jóuno ou chabrólo ; la vieille lune : luno pendento ; en plein éclat, elle est dite eiparado ; quand elle est trouble ou voilée d’une légère brume, elle est féro ou bagnado, et quand elle est cachée par les nuages, la luno ei clucado. Le croissant est : lou voulan (ce mot désignant aussi la faucille).

Dicton :

Luno chabrolo
tèro mólo.
Luno pendento
tèro fendento.

Une étoile se dit eitèlo, eitelejã, briller comme une étoile ; siau eitala (ciel étoilé). La Pléiade est appelée : lou poussinièro ; la Grande Ourse : lou charió de Davi ; Orion : lou ratèu ou lou trei bourdou, ou lou trei rei ; la Voie lactée : lou chami de Sen Jaque, et l’étoile du soir : lou ligou ou l’eitèlo dóu bargié.

 

3) Le soleil

On dit lou soulei, sauf dans la zone S.E. : soulel. Les rayons du soleil : lou rai. Raiã, dardeiã : signifient briller et souleiã : faire soleil. Au soleil se dit a la raio dóu soulei et en plein soleil très ardent : a bouno goro de soulei. On dit aussi, pour briller : lusi et luquetã. Pour désigner le lever et le coucher du soleil, on emploie les expressions soulei levan, leva, soulei entran, entra. Le soleil se couche : lou soulei cólo, entro, davalo… La veprado désigne souvent le soleil du soir. Sourelhã et soulelhã, c’est exposer quelque chose au soleil. Le soleil monte à l’horizon : lou soulei s’einauto.


4) La lumière et l’ombre

Lu et lumièro désignent la lumière. Clarta : la clarté, mais on dit plus souvent : lusour et clarour. Un jet de lumière est uno eilusido ; une demi-clarté : uno entrelusido ; une lumière subite : tralusido ; l’oumbro, c’est l’ombre, mais il fait sombre se dit : fai bru. Se mettre à l’ombre : se souloumbrã.

 

5) Le temps

Pour dire que le temps (tèm) devient beau, on emploie les verbes s’eibelã, s’abeli, s’eibeli. Il fait brave tem, ou, au contraire : mau tem. Un temps brillant est dit fi, eibarbi. Quand il s’éclaircit, on dit lou tem s’eilèvo, se drubo, s’eimèro, et une éclaircie s’appelle : uno eiclarsido, ou uno eibelado. Quand le temps s’assombrit, il est soumbre ou sourne. (verbe : s’ensourni, s’atrumã, se crumi.).

 

6) La chaleur

Chalour, mais une chaleur d’orage : chalino […]. La chaleur étouffante : la gabour, mais surtout : la chaumasso (zone S.E. : la coumo).
La chaleur qui dessèche les plantes est l’eibraio ou la sechièro, et on dit que la plante est : uclado ou cramado. Quand la chaleur commence à se lever : la chalour s’endressavo.

 

7) Le froid

C’est lou frè. L’adjectif froid : frè (féminin : frejo), l’adjectif frais : freiche (féminin : freicho ; diminutif : frechilhou). Un frileux est un eifrejuri (eifrejurido) ou un afrejouli (afrejoulido) ; triboulã de frè : trembler de froid ; se virã lou frè : se préserver du froid ; lou marfiè, c’est le froid aux mains, l’onglée ; s’engraupi : être engourdi de froid, et on dit de quelqu’un saisi par le froid, qu’il est guer (féminin : guerso) ; la glace se dit très rarement la glaço ? on dit partout lou jeù : geler, jalã, jalussã. Si un n’ero pas bien couata (couvert) un jalorio. Le givre se dit lou jéure (verbe : jeureia) et, quand il y a de la gelée blanche, on dit : co brado ! (verbe : brada) ; la glace fondante : aigojeù ; un morceau de glace : un tro de jeù. Il gèle fort : cosarro ! La grêle se dit rarement la grèlo. On dit la groniso. La neige se dit indifféremment la nevio ou la neveio, la neveio couato (couvre) la tèro au prun (au cœur) de l’iver.

 

8) Le vent

Le vent froid se dit vèn fre ou biso ; un vent impétueux : vèn foulhè, vèn bufanié, vèn d’eibran. La brise légère : l’auro, lou ventoulé. Le vent du nord : vèn nègre ; le vent du sud : vèn de la soulièro ; le vent d’est : vèn d’auto, auvergnasso. Le vent du nord-ouest est désigné par plusieurs noms : vèn chabrié, mato-chabro, vèn de la fenna ; le vent d’ouest : vèn dóu traver et quelquefois Armorijo (le vent de la mer). Le vent du N.E. : vèn clar ; du S.E. : vèn blan ; du S.O. : vèn foulèn, vèn de l’uba. Le vent se lève : lou vèn s’endresso. Le vent m’arrête : lou vèn m’acouto.


9) L’orage, la tempête

La tempête se dit : la chavano, lou brefounié ; un tourbillon : uno remoulinado. Tonner : lou touneri (verbe : tounã) ; la foudre : fio dó sèu. Un éclair : un eilaujo (pluriel : doùs eilaujei) (dans la zone S.E. : un eiliausi). L’arc-en-ciel se dit rarement riclano ; on dit presque partout arcano.
[…]

 

10) Nuages et pluie

Partout on dit : uno niblo ou uno nivour. Se couvrir de nuages : s’enniblã, et uno nivoulado : un amoncellement de nuages. Nuageux se dit niblous (niblouso), nivoulous (nivoulouso), nibla (niblado). On dit : lou ceu ei cuber, ou ei couata, ou ei capela. Les nuages se dissipent : lou tem s’einauto.
Le brouillard se dit : la brumo (verbe : brumã, brumeiã ; adjectif : brumous-ouso), mais on dit aussi : l’eitubo ; la brume c’est : la plevigno, et quand il tombe de la brume, on dit : bourrinã. Le mot brumo désigne surtout la brouissure qui affecte les plantes. Dans ce sens, on dit aussi : l’uclo. La rosée blanche se dit : la brado ou l’eigagno et quelquefois : la rousado (s’arousadã lou pe : se mouiller les pieds de rosée). La pluie : la pleio (zone S.E. : la plejo), et pleuvoir : pleure. Une averse : un lavassi ou uno óurado (à signaler un vieux mot parfois encore en usage, le verbe aviaja, employé dans la locution : l’aigo ei bien aviajado : le temps est décidément à la pluie ; on dit aussi d’un nourrisson qui prend facilement le sein : aviajo lou la : il fait bien venir le lait). Une giboulée de mars : marsoulado ; pleuvoir à verse : pleùre a gèblo (zone S.E.), pleùre a raisse.
Se tremper jusqu’aux os c’est s’alacã, et se mettre à l’abri : s’assalã.

 

11) Le jour et la nuit

L’aube se dit l’aubo (zone S.E. : albo), mais on emploie souvent les expressions suivantes : se levã au ligou, a la pico, a la pouncho dóu jour, a la cliqueto, la prumièro cliardo dóu jour. Midi : miejour ; vers midi : sur lou miejour. Matinado et Mandinado (zone S.E.), désignent la matinée et serenado ou veiprado : la soirée. On dit du soir au matin : dóu sei au mati et non du matin au soir. A jour fali, a l’errour veut dire « la brume ». , c’est la nuit. Moi-nè : minuit ; traucã la nè : passer la nuit ; la nuit noire est qualifiée de bouchardo ; s’annuiter se dit s’anechã ou se boutã en nè.