Histoire des Maires
Introduction
Première époque : période révolutionnaire (1789-1800)
Deuxième époque : période du Consulat et du Premier Empire (1800-1815)
Troisième époque : période de la Restauration (1814-1830)
Quatrième époque : période des Bourbons-Orléans (1830-1848)
Cinquième époque : période de la Seconde République puis du Second Empire (1848-1870)
Sixième époque : période de la Troisième République (1870-1940)
Septième époque : période de l’occupation et du gouvernement de Vichy (1940-1944)
Huitième époque : période du gouvernement provisoire puis de la Quatrième République (1944-1959)
Neuvième époque : période de la Cinquième République (depuis 1959)
Lexique
Deuxième époque : période du Consulat et du Premier Empire (1800-1815)
Bonaparte Napoléon Ier
Le coup d’état du 18 brumaire an VIII (9 novembre 1799) amène Bonaparte au pouvoir. Celui-ci maintient provisoirement les municipalités de canton et les élus doivent prêter un nouveau serment : « Je jure d’être fidèle à la République une et indivisible, fondée sur la liberté, l’égalité et le système représentatif ». Cependant, trois mois plus tard (le 28 pluviôse an VIII = 17 février 1800) une nouvelle loi municipale est instaurée et change complètement le système d’instauration des maires. Cette nouvelle loi allait dans le sens de ce que réclamaient les paysans qui tenaient à avoir dans leur commune leur propre conseil municipal et leur maire, mais elle devenait beaucoup moins démocratique puisque l’élection du maire, appliquée en 1790, était supprimée à partir de la constitution du 22 frimaire an VIII (13 décembre 1799), celui-ci est dorénavant nommé. Maires et conseillers deviennent donc des fonctionnaires de fait (sans rétribution), choisis sur une « liste de confiance », par le Premier consul* pour les communes de plus de 5 000 habitants, par le préfet pour les autres. La « liste de confiance » est établie dans chaque commune par élection. Elle comprend le dixième des électeurs. C’est le retour des notables : la « liste de confiance » devient d’ailleurs très vite une « liste de notabilité ». Cependant, dans les petites communes, au-dessous de 1 000 habitants, ce sont en majorité des paysans, bien que les notaires soient recherchés par les préfets pour leurs capacités à la rédaction et à l’élocution. Néanmoins, le maire ne peut pas être totalement ignorant et doit au moins savoir lire et signer.
La seconde grande loi municipale (celle du 28 pluviôse = 17 février 1800) classe les communes en cinq catégories : au-dessous de 2 500 habitants, de 2 500 à 5 000 habitants, de 5 000 à 10 000 habitants, de 10 000 à 20 000 habitants, au-dessus de 20 000 habitants. L’appellation de maire revient, il remplace celui d’agent municipal*. Le maire est assisté d’un adjoint. Les officiers municipaux* deviennent des conseillers municipaux.
Le 17 ventôse an VIII (8 mars 1800) un arrêté oblige les municipalités en place à faire l’état du mobilier et des registres communaux. En mai-juin, maires et conseils municipaux des entités communales de moins de 5 000 habitants sont nommés par le préfet. Le maire, nommé pour trois ans, prête serment devant l’ancien agent municipal* et l’adjoint prête serment devant le maire.
Le premier maire nommé à Blis-et-Born est Pierre Lagorce, le même qui fut agent municipal* en l’an IV (1795). On le trouve dans cette fonction au moins jusqu’au 6 pluviôse an XI (26 janvier 1803). Comme adjoint, on trouve Pierre Bost du Repaire.
Pierre Bost, dit « du Repaire », semble avoir fait partie de l’assemblé de la municipalité de Blis-et-Born avant l’an III de la République. Fils de François Bost et de Demoiselle Rougier, il se maria le 19 août 1788 avec Françoise de la Salle de La Faurie. C’est à partir de ce mariage que le repaire noble de La Faurie passa des de la Salle aux Bost. Pierre Bost du Repaire mourut à l’âge de 72 ans, le 6 octobre 1832.
Au moins à partir du 9 prairial an XI (29 mai 1803), Pierre Lagorce est remplacé par Jean Lacoste. Pierre Bost du Repaire reste adjoint. Au sujet de Jean Lacoste, voir, dans le 2e fascicule des Etudes Historiques sur Blis-et-Born, ce qu’il écrivait au préfet, au sujet du curé Bernard Pouyaud. Jean Lacoste est né le 1er octobre 1775 à La Jaye. Il était le fils de Grégoire Lacoste et de Catherine Faucon. Alors maire de la commune de Blis-et-Born, il épousera, le 15 messidor an XII (3 août 1804), Marie Parot du Change. Malade, il se rendit à Paris où il y décéda le 6 octobre 1807.
En effet, dès juillet 1807, le maire n’était plus à son poste depuis plusieurs mois, et son adjoint (Pierre Bost du Repaire) s’en plaignait auprès du district. Ne trouvant personne qui puisse remplir les fonctions de maire à Blis-et-Born, Jean de Calvimont, maire de Saint Antoine-d’Auberoche, fut contacté par le préfet. Celui-ci répondit le 6 juillet 1807, et dans sa lettre, il écrivait entre autre (je respecte ici l’orthographe et les tournures de phrase de la lettre) :
« connaissant la commune de Born comme la mienne, je n’y vois personne en état d’occuper la place de maire. Monsieur Gautier en aurait les moyens et les calités, mais sa place de percepteur l’en excluant, il n’y en à pas d’autres ».
Il ajoutait : « Si cette pénurie vous force, comme vous me faites l’honneur de me le dire, à la réunion de cette commune à la nôtre, je n’y vois pas de grands inconvénients. Il y a cependant quelques vilages entre Born et le Change, entrautres La Richardie, qui sont plus près du Change que de Born : il conviendrait mieux au Change, quils ne convient à Born, et par conséquent serait trop loin de St Antoine ».
Il termine en disant : « Vous connaissés de réputation la commune de Blis-et-Born ayant été aussi mal administré, ils ne sont au couren de rien. L’adjoint, j’en conviens avec vous, n’est pas un bon administrateur, mais s’il avait quelqu’un pour diriger, je crois qu’il ne manquerait pas de bonne volonté » (AD : 1 M 47, document 2336). Sous la même cote, nous trouvons trois autres documents intéressants concernant cette idée de placer notre commune sous l’autorité du maire de Saint Antoine-d’Auberoche.
Le premier document date du 20 juillet 1807 et il s’agit du compte-rendu du conseil municipal de la commune de Saint Antoine :
« Aujourd’huy
vingt juillet mille huit cent sept à cinq heures du soir le conseil
général de la commune de St antoine assemblé extraordinairement,
en vertu de la lettre de mr le préfet de la Dordogne, membre de
la légion d’honneur, datté du 15 de ce mois, aux fins
de déliberer sur la réunion de la commune de Blis de Born à celle
de St antoine.
Le conseil réuni,
mr le maire lui à donné lecture de la sus dite lettre et après
avoir murement refléchi au motif qui détermine cette reunion,
le conseil donne son adésion plaine et antière à la réunion
de Born à St antoine. Il observe, à monsieur le préfet,
qu’il croit que, les vilages si après désignes, devrait étre
reunis aux communes auxquelles ils semblent de droit faire partie.
1e Le vilage
de La Richardie en son entié, plus près du Change que de Born
semble lui être dévolu, il est du double éloigné de
St antoine.
2e Deux maison
du vilage de Béder seulement sont de la commune de Born, le reste Deyllac,
il conviendrait que la totalité de ce vilage fut a Eyllac.
3e
(mot illisible) Brande maison isolé très près Deyllac fort
loin de Born, et plus encore de St antoine, semble avoir été détaché mal
a propos de l’arondissement communal Deyllac.
Le conseil
soumet ses reflexions à monsieur le préfet, lequel estatura
ce qu’il croira bon être.
A la mairie
de St antoine le même jours mois et an que dessus, et n’ont
signé avec nous m.m. Jean Laboutade, Léonard Bourdeil, Léonard
Amelon, Léonard Siozard, Jean Amelon, Jean Cambrai, et Jérome
Claira tous membres du conseil pour ne savoir.
Calvimont
maire »
Jean-François Maurice de Calvimont était issu d’une vieille famille noble, les seigneurs du château de l’Herm. Il était domicilié au Cros de Saint Antoine-d’Auberoche, village des de Lamberterie du Cheylard, famille dans laquelle les de Calvimont étaient entrées par alliance. L’épouse de Jean-François Maurice de Calvimont était Antoinette Soiris-Saint-Géry et leur fils (Jean-Baptiste) Albert de Calvimont, fut préfet de la Dordogne.
Le 15 juillet, les services de police du district demandent à Bost du Repaire que la commune de Blis-et-Born désigne la commune à laquelle elle souhaite son rattachement, mais celle de Saint Antoine lui est fortement conseillée (AD : 4 M 15, article 2348). Voici le rapport de délibération du conseil municipal, daté du 26 juillet (en respectant toujours l’orthographe et les tournures de phrases) :
« Le
conseil municipal de la commune de Blis et Born assemblé en vertu
de l’authorisation de monsieur le prefet du departement de la Dordogne
membre de la légion d’honneur du quinze du courant, delibérant
par le contenu en celluy est davis.
1° que le maire etant absent depuis
plusieurs mois sans qu’on connaisse precisement lepoque de son retour,
doit etre remplacé au moins momentanement quoi qu’il aye encore
les proprietés au lieu de las Junias commune de Born,
2° que
malgré les faux renseignements qui ont été transmis
a monsieur le prefet dans l’intention sans doute de linduire a erreur
il existe dans la commune de Born plusieurs personnes en etat doccuper la
place de maire et qui laccepteraient.
3° que la reunion de cette commune
loin d’etre indispensable est impossible et ne peut se proposer parceque
la commune de Born est une grande commune composée de 240 articles
de contribution fonciere, et qui par sa position reunit a son chef lieu
tous les jours des marchés de Cubjac et de Saint Pierre de Chignac,
de fete et de dimanche une grande quantité dhabitants des communes
voisines pour traiter des affaires, on a si bien reconnu que la commune
de Born au lieu detre divisée devait etre augmentée, que daprès
sa position on devait ajouter au territoire de cette commune quelques hamaux
des communes Deyliac, Bassilliac Le Change et Montagnac, dapres les bornes
invariables que la nature a placé. Monsieur le prefet peut se faire
mettre sous les yeux le proçès verbal des commissaires quil
nommat aut effet, il sera convaincu de cette verité.
4° qua supposer
qu’il dut s’operer quelque reunion, ce serait sans contredit
la commune de Saint antoine qui devrait etre reunie au moins en partie a
celle de Born, puisque la premierre na tout au plus que 50 articles de contribution
fonciere tandis que Born en a 240 art. puisque la premerre na sur son territoire
qu’un seul signataire tandis que la seconde en a au moins 25 de tel
nombre desquels sont mess. Bost Durepaire, Parrot notaire, Lagorce, Chancel,
Gautier, Richard Cellerier Albert Lascaux Savignac (mot illisible). Puisque
dans toute la commune de Saint antoine il n’y a qu’un seul signataire,
qu’on na pas pu meme y trouver un adjoint. Tandis que la commune de
Born a toujours eu des maires et des adjoints et doit en avoir encore. Les
membres du conseil municipal qui ont recueuilli le voui de tous les habitants
de leur commune reconnaissent si fort lutilité de sa concervation
qu’ils ont chargé messieurs Pierre Bost Durepaire, et Pierre
Parrot, de presenter a vous monsieur le prefet la presente deliberation
de presenter tous memoires faire dans linteret de la commune toutes demarches
necessaires aupres de toutes les authorités competentes. Deliberé au
chef lieu de Blis et Born le 26 juillet 1807. »
Cette lettre est suivie de nombreuses signatures, puis d’une note provenant probablement des services du préfet, qui se demande s’il n’y a pas là une « cabale, quelques membres n’ayant pas voulu même signer ».
Enfin, voici le troisième document, correspondant, celui-ci, à la réponse du maire de Saint Antoine au préfet, et datée du 30 juillet 1807 :
« Monsieur le préfet
J’ai
cru devoir répondre à la confiance dont vous m’honnoriés
par vôtre demande du 27 juin dernier en vous disant avec franchise ce
que je croyés sur la disette des sujets à l’administration
de la commune de Born. J’étais loin lors de penser que le Sr Parot
se mit sur les rends pour étre maire : même qu’il fut habitant
de Born n’y ayant de maison dhabitation en propre ; n’y en location.
Qu’ent à sa moralité, je n’en suis ni l’escrutateur,
ni le panégiriste. Cet à vous monsieur le préfet, a savoir
ce qu’il mérite de confience et destime.
Mr Lagorce maire démitionnaire
de Born, declara de bonne foi ne rien connaître à l’administration, étre
incapable d’en occuper la place. Il est brave homme, mais il faut savoir
plus que signer, et dans le vrai cet tout ce qu’il sait faire.
Mr de Chancelle
habite Périgueux. Mr Gautié : je m’en refaire à la
notte donnée, elle est pressise et si j’avés a y ajouter
se serait un surcroit déloges. Richard brave homme, mais ne sachant que
signer et avec beaucoup de peine, et ne sait pas lire. Célérié de
même, Albert à peu près de même. Savignac banqueroutié avéré,
même de notoriété publique. Sur quoi est donc basé,
les faux renseignements qu’on pretend vous avoir été transmis
: le Sieur Parot dans sa présidence usurpé du dernier conseil
de la commune de Born, dont il n’est pas même membre : secrétaire
en même temps que président, eut du refléchir ; qu’on
ne doit rien avencer, qu’on ne puisse prouver.
Ce que j’ai eu l’honneur
de vous ecrire à se sujet dans ma dernière, y a la confiance dans
celle cy, et vous prie pour ma propre satisfaction, de vouloir bien le faire
vérifier. Sil existe deux cent quarante articles sur le role de Born,
puisqu’on c’est donné la paine de le vérifier ; combien
dans se nombre y en à til de faurins ? Beaucoup plus que de la moitié.
Dans cette nomenclature de 240 articles de roles de Born, 50 de St antoine font
une triste figure, (quoi qu’on n’aye pas pris le relevé exact)
mais en revenche, elle possède une église bien en état,
une maison curiale (mot illisible), deux jardins : et le (mot illisible) de
Born, à pour église une étable tombant en ruine de toutes
part, n’ayant que le cœur de l’eglise couvert. La sacristie à découvert
point de maison curiale n’y jardin : n’offrant nul secour au desservant.
Se serait donc une sur charge à donner à St antoine qu’elle
n’a point brigai, et qu’elle est loin de desirer. Mais, elle se
fera toujours un devoir d’accueuillir tout ce qui lui sera ordonné par
monsieur le préfet.
Qu’ent à ses signatures
dont parle le conseil de Born, St antoine en à une quinzaine tous propriétaires
de la force du lieu de Born, mais qui, par délicatesse, sabstiennent
de signer se qui ne savent pas lire, de crainte de fausseté. Sur cinquante
signataire qu’ils ferait, pas une ne serait égale, ni tun soi peu
ressemblante. Cet ce qu’on peut vérifier sur celle de Born. Je
n’ai nulle connaissance de la conscription des communes relativement au
culte catholique, que celle qui concerne la mienne ; et se qu’a aprouvé sa
majesté l’empereur le 30 thermidor an 13 dont vous m’avés
fait passer l’extrait le 26 aout 1806. Ce qui me fait présumer
qu’alors, Born n’était pas destiné à étre
considérable, si toutes fois on voulait concerver cette commune.
L’article
des marchés de Cubjac et de St pierre, l’affluence des j’ens
qui aboutissent à Born, D’Eyllac, Le Change, et autres communes,
les jours de dimanche, est un rêve creux, il suffit de connaître
la localité, pour en donner un démenti formel.
Salut
et Respect
Calvimont
maire »
Le 30 septembre 1807, le problème est momentanément résolu. En effet, c’est Jean Albert qui est nommé maire de Blis-et-Born et Pierre Lagorce l’adjoint à la place de Pierre Bost du Repaire, ce dernier étant nommé percepteur « à vie » de la commune (AD : Ibid., articles 2416 et 2417).
Il y avait à l’époque plusieurs familles Albert à Blis-et-Born, mais sachant que notre Jean Albert était de Lacaud, il ne peut s’agir que de celui qui est né le 25 septembre 1758 au Lac, de Jacques et de Françoise Desmaux. En effet, on retrouve ensuite cette famille à Lacaud à partir de 1767. Jean Albert avait épousé Catherine Faucon et il décéda à Lacaud le 5 mai 1815. Jean Albert avait donc 49 ans lorsqu’il fut nommé à la tête de la commune.
A compter du 2 pluviôse an IX (22 janvier 1801) le maire est chargé seul de l’administration de la commune et les conseillers ne seront consultés que lorsqu’il le jugera utile. Ce pouvoir absolu du maire sera exercé jusqu’en 1867, renforçant le prestige attaché à la fonction. En 1802 (ans X-XI), les « listes de notabilités » sont supprimées pour être remplacées à nouveau par le suffrage censitaire*, et un arrêté du 19 fructidor an X (6 septembre 1802) décide que les notables communaux constituent le corps électoral. Les conseillers sont nommés pour dix ans et le maire et son adjoint pour cinq ans. Le premier renouvellement aura lieu en 1808.
A Blis-et-Born il n’y a pas eu de renouvellement du maire en 1808. Il faut dire que Jean Albert avait été nommé l’année précédente. Il restera à ce poste jusqu’au 19 décembre 1810, date à laquelle le district lui demande de démissionner pour raison de « faiblesse de caractère ». En effet, Jean Albert était accusé, dès le 26 novembre 1810, de protéger les réfractaires. Une formalité de suspension aurait pu être engagée, cependant, une démission était plus honorable (AD : 4 M 16, article 5423).
La démission de Jean Albert semble entraîner également celle de son adjoint, Pierre Lagorce. De même, cette démission donne l’occasion au préfet de ressortir sa vieille idée de réunir Blis-et-Born à Saint Antoine. Cependant, il opte simplement pour la mise sous « l’administration provisoire » du maire de Saint Antoine. Ouf ! l’entité territoriale de la commune est conservée. Que serait Blis-et-Born aujourd’hui si la première idée de Jean de Calvimont avait été acceptée par le préfet : La Richardie serait peut-être encore sur le Change, et Le Grand-Beder sur Eyliac. Quant à la maison isolée très près d’Eyliac et dénommée par de Calvimont « La Brande », je pense qu’il s’agit plutôt de La Peyrade ; peut-être ce lieu serait-il encore aujourd’hui sur Eyliac : Louis-Marie serait aujourd’hui conseiller d’Eyliac et non de Blis-et-Born...
Jean de Calvimont, encore maire de Saint Antoine-d’Auberoche, est donc nommé, en décembre 1810, administrateur provisoire (avec fonction de maire) de Blis-et-Born, en remplacement de Jean Albert. Le provisoire durera puisqu’il y restera jusqu’à la mi-janvier 1813. Si l’on en juge par les quelques actes que nous avons à notre disposition, il semble bien que cet administrateur agissait avec beaucoup plus de zèle et de fermeté que son prédécesseur. Par exemple, le 15 mai 1811 le maire intervient contre semble-t-il les mauvais agissements d’un certain Chillot et d’un certain Plazanet (AD : 4 M 16, article 5544) (à l’époque il y avait des Plazanet aux Guérolles ; quant aux Chillot, je n’en trouve aucune trace sur notre commune). De même, le 18 juin suivant, il intervenait contre un certain Gadeau (AD : Ibid., article 5576) (je pense qu’il s’agit de Jean Gadeau, venu du Change le 12 janvier 1807, pour se marier avec Philippine Savignac. Il demeura ensuite à Born, où il mourut le 23 juillet 1841). Dans le même document d’archive, nous apprenons que le maire a pris des dispositions « pour interdire le maraudage et le vagabondage » sur la commune, action pour laquelle il est félicité par les services de police du préfet. Les rapports entre le maire et son adjoint (Pierre Bost du Repaire) sont exécrables, et dès le 4 décembre 1811, l’ajoint reçoit un sermon des services de police du préfet pour une « lettre très inconvenante » qu’il aurait envoyée à son supérieur hiérarchique. Dans le même document, il lui est clairement reproché sa mauvaise manière de remplir ses fonctions d’adjoint municipal (AD : Ibid., article 5774). Pierre Bost du Repaire pensait qu’en sa qualité d’adjoint, les actions de police dans la commune lui revenaient exclusivement et il ne voyait pas l’utilité d’en informer le maire. De même qu’il se sentait seul responsable de la commune de Blis-et-Born puisque l’administrateur désigné était citoyen et maire d’une autre commune. Dans une lettre du 7 janvier 1812, il lui est demandé, par le commissaire de police du district, de bien vouloir démissionner (AD : Ibid., article 5802).
Jean de Calvimont sera remplacé par Joseph-Antoine de Léparre. Joseph-Antoine de Léparre s’appelait en fait « de Ladoire de Chamizac », « Léparre » était le nom de deux métairies qu’il possédait sur la commune de Celles en Dordogne et dont il avait pris le nom. Officier de l’armée, il était originaire de Celles, son père était Simon de Ladoire de Chamizac de Celles et sa mère, Jeanne Fournier, de Périgueux. Il est venu habiter le château de Blanzac après son mariage avec Marie-Marguerite Nancy de Migot de Blanzac, où il décéda, à l’âge de 86 ans, le 25 novembre 1838 (Information orale de Robert de Tessières).
Dès l’arrêté du 26 floréal an IX (16 mai 1801), un uniforme est imposé : habit bleu et ceinture rouge à franges tricolores pour le maire, même habit mais les franges de la ceinture doivent être blanches pour l’adjoint. Le 8 messidor an IX (27 juin 1801), il est précisé que l’habit du maire doit avoir des boutons d’argent et « un triple liseré uni, brodé en argent, au collet, aux poches et aux paremens* ». L’adjoint se distingue par deux liserés brodés, mais porte, comme le maire, un bicorne* garni d’une ganse* et d’un bouton d’argent. Maires et adjoints doivent s’acheter leur costume, et, dans les petites communes, ils n’auront pas toujours les moyens de se l’offrir. Pour guider les maires dans leurs tâches, un manuel est publié dès 1801 (ans IX-X) par Charles Dumont de Sainte-Croix ; il sera réédité en 1805. Une circulaire ministérielle recommande l’assistance d’un greffier.
A partir de 1803, le maire se doit d’appliquer le « Concordat* » dans sa commune, il doit faire assurer l’entretien de l’église et du presbytère, trouver les moyens de compléter le traitement du curé. Le décret du 12 juin 1804 impose l’édification d’un cimetière à l’extérieur du village ; l’ancien, proche de l’église, ne doit plus être utilisé. En 1807, l’Empereur ordonne la levée du cadastre et plusieurs maires successifs vont devoir régler les innombrables litiges de bornage. L’une des plus difficiles charges reste néanmoins celle de dresser la liste annuelle des conscrits, où seuls les célibataires figurent : exemptions et remplacements dépendent de lui, et aucune indulgence ne lui est permise. Un arrêté du 22 décembre 1804 rend le maire responsable des réfractaires et des déserteurs. Les guerres napoléoniennes incessantes réclament de plus en plus d’hommes, et, à la fin de 1813, les hommes mariés sans enfants sont appelés sous les drapeaux.
A Blis-et-Born, nombreux sont les conscrits déserteurs : nous avons Michel Cornu (peut-être celui des Granges ?) à la date du 1er août 1806 (AD : 4 M 15, article 1774) ; un certain Feyfantie la même année (AD : Ibid., article 1952) ; Antoine Carrau à la date du 4 juillet 1810 (AD : 4 M 16, article 5471) (ce dernier, réfractaire du service militaire de l’Empire, fut envoyé à l’Île de Ré, où il mourut, à St Martin, le 10 juillet 1812 à l’âge de 25 ans. Il était né à La Richardie en octobre 1786). Jean Albert et Pierre Lagorce durent démissionner de leurs situations de maire et d’adjoint pour les avoir protégés. Avec l’arrivée de Calvimont à la tête de la commune, les choses furent plus difficiles pour les déserteurs et nous apprenons, par exemple, que Antoine Lachaud et Sicaire Blanchard furent vite arrêtés (AD : Ibid., article 5658).
Nombreux aussi sont ceux qui disparaissent dans la « Grande Armée ». La charge de prévenir les familles revient alors au maire : la mort de Jean Tocheport est annoncée le 24 octobre 1810 (AD : Ibid., article 5574), celle de Pierre Pompougnac le 14 janvier 1811 (AD : Ibid., article 5451). Jean Tocheport, fils de François Tocheport (l’ancien maire), avait 22 ans et était né aux Marguis. Pierre Pompougnac est décédé à l’hôpital d’Alexandrie en Egypte. Il était né à Las Censias en août 1790, et n’avait donc pas encore 21 ans. Il convient aussi d’ajouter : Jean Cournut, décédé à 21 ans, le 1er juin 1810, à l’hôpital de Bayonne ; Martial Sudry, décédé le 2 février 1811 à Padane dans la plaine du Pô (Nord de l’Italie) ; Jean-Baptiste Perouny (de Born), décédé à l’hôpital de Belfort le 8 janvier 1813 ; Bernard Savignac, décédé le 31 août 1814, à 25 ans, à l’hôpital de Moissac dans le Tarn et Garonne ; Armand Dettrieux (de Born), décédé le 21 septembre 1814, à 27 ans, au célèbre château de Sagunto près de Valencia en Espagne ; Jacques Parat, dit « Bourzat » (de Born), décédé également le 21 septembre 1814, à 49 ans, à l’hôpital de Rochefort en Charente maritime…
Suite : Troisième époque : période de la Restauration (1814-1830)